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Transparence et démocratie / Opacité de l'UE

ARGUMENTAIRE AU SOUTIEN DE LA SAISINE PAR POLLINIS du médiateur européen

POLLINIS saisit le médiateur européen contre l’opacité des procédures d’évaluation du risque des pesticides sur les pollinisateurs, après le refus de la Commission européenne de lui transmettre des informations capitales concernant directement les citoyens, leur santé et leur environnement, relatives à l’adoption des méthodes d’évaluation.

Date : 5 décembre 2018

L’Europe fait face à un déclin massif des pollinisateurs : plus de 75 % des insectes volants ont disparu des aires protégées allemandes journals.plos.org, chiffre qui, d’après les chercheurs qui ont mené l’étude, peut être étendu à l’ensemble du territoire européen. Il est donc primordial de mettre en place des mesures urgentes pour enrayer ce déclin, comme l’a récemment fait valoir l’Union européenne dans le cadre de son Initiative pour les pollinisateurs ec.europa.eu/environment. Or, les procédures actuelles d’évaluation du risque des pesticides pour les pollinisateurs, qui représentent un pan essentiel de ces mesures, ne sont toujours pas harmonisées au niveau européen et suivent des lignes directrices obsolètes non conformes aux règlements en vigueur.

En effet, le système d’homologation des pesticides a évolué en 2009 suite à l’adoption d’un nouveau règlement Règlement n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE. qui pose la protection de la santé humaine et de l’environnement comme principe fondateur. Cela a entraîné la révision en 2013 des critères d’approbation des pesticides Les données requises pour l’homologation des substances actives sont précisées dans le règlement (UE) n° 283/2013, et pour les produits phytopharmaceutiques dans le règlement (UE) n° 284/2013. , avec l’exigence de nouvelles données, afin de mieux prendre en compte les risques posés par ces substances. Cependant, les protocoles d’évaluation eux n’ont pas changé. En effet, les lignes directrices concernant l’écotoxicologie terrestre SANCO guidance document on terrestrial ecotoxicology – SANCO/10329/2002.– qui comprennent les protocoles de tests pour évaluer le risque des produits phytopharmaceutiques pour les abeilles – ont été établies en 2002 Une partie de ce protocole (EPPO 170) a été mise à jour en 2010 ; toutefois, des membres du Parlement européen ainsi que les associations d’apiculteurs ont mis en évidence les failles de ce protocole, voir EFSA Journal 2013, 11(7)
3295, p. 6.
, conformément à l’ancienne directive sur les pesticidesDirective du Conseil n° 91/414 concernant la mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques. , qui date elle de 1991 et est beaucoup moins exigeante en matière de prévention du risque.

En ce qui concerne les pollinisateurs, pour fournir une évaluation du risque plus complète en accord avec le nouveau cadre réglementaire, la Commission européenne a donné mandat à l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) afin que celle-ci produise des lignes directrices pour mesurer les effets des produits phytopharmaceutiques sur les abeilles (abeilles mellifères, bourdons et abeilles solitaires), appelées ci-après lignes directrices de l’EFSA EFSA 2013, Guidance Document on the risk assessment of plant protection products on bees (Apis mellifera, Bombus spp. and solitary bees , EFSA Journal 2013, 11(7); 3295.. Ce document a été conçu afin d’apporter des instructions claires pour les demandeurs et les autorités lors de l’examen des dossiers de demande d’homologation des produits phytopharmaceutiques et de leurs substances actives conformément au règlement n° 1107/2009.

Publiées en 2013 et mises à jour en 2014, les lignes directrices de l’EFSA fournissent un cadre d’évaluation approprié – à ce jour le plus abouti bien qu’il ne soit pas exhaustif – pour mesurer l’impact des pesticides sur les abeilles (abeilles domestiques, bourdons et abeilles solitaires).

Pourtant, l’adoption de ces lignes directrices est bloquée depuis 2013 par le Comité permanent des végétaux, des animaux, des denrées alimentaires et des aliments pour animaux (SCoPAFF) et ce, alors même que le SCoPAFF (composé de représentants de chaque Etat membre de l’UE et présidé par un représentant de la Commission européenne) a été préalablement consulté par l’EFSA pour définir les objectifs de protection à atteindre.

Dans ce contexte, POLLINIS – qui demande l’adoption par la Commission européenne desdites lignes directrices Guidance Document on the risk assessment of plant protection products on bees (Apis mellifera, Bombus spp. and
solitary bees de l’EFSA.
– cherche à comprendre ce qui en bloque l’adoption et dépose une plainte auprès du médiateur suite à la réponse négative de la Commission européenne à sa demande de consultation des documents relatifs aux délibérations du SCoPAFF à ce sujet. La Commission européenne justifie son refus en affirmant que les informations demandées ne relèveraient pas de l’intérêt public supérieur.

POLLINIS entend donc attirer l’attention du médiateur, à titre principal, sur le fait que la procédure d’évaluation du risque présente de fait un intérêt public supérieur. A titre subsidiaire, sur le non respect du principe de séparation entre l’évaluation du risque et la gestion du risque, tel qu’établi par le règlement (CE) n° 178/2002, lorsque le SCoPAFF, qui est un comité préposé à la gestion du risque, décide de l’adoption ou de la non-adoption de lignes directrices scientifiques conçues pour l’évaluation du risque.

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