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Pesticides

L’EFFET COCKTAIL MORTEL POUR LES ABEILLES DÉMONTRÉ DANS UNE NOUVELLE ÉTUDE

Des chercheurs de l’Inra viennent de montrer que la combinaison d’un agent infectieux et d’un insecticide menace les ruches. Un cocktail mortel qui devrait obliger à revoir la procédure d’évaluation des pesticides. Ce résultat pourrait éclairer d’un jour nouveau le déclin et les mortalités massives observées dans les colonies d’abeilles.

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Date : 4 juin 2012
Gros plan abeille fleur violet foncé et blanc PIAXABAY CC0

L’Imidaclopride, agent actif du Gaucho, un insecticide systémique, et Nosema Ceranae, un microparasite de l’intestin, affaiblissent conjointement les abeilles, voire les tuent massivement.

C’est ce qu’ont montré Cédric Alaux, Yves Leconte et leurs collègues de l’Inra d’Avignon, dans une étude passée curieusement inaperçue : « Notre étude montre que si elles sont contaminées par Nosema, les abeilles exposées à l’Imidaclopride, même en quantité infime, succombent à la nosémose », explique Yves Leconte.

Gros plan abeille fleur violet foncé et blanc PIAXABAY CC0

Un résultat qui pourrait éclairer d’un jour nouveau le déclin et les mortalités massives observées dans les colonies d’abeilles, aux Etats-Unis, en France, et dans la plupart des pays européens.

Car aujourd’hui, d’après l’Afssa (l’Agence de sécurité sanitaire et de l’alimentation, aujourd’hui rebaptisée Anses), on retrouve des résidus d’Imidaclopride dans 50 % des ruches de l’Hexagone. Et la présence de Nosema Ceranae est avérée dans la quasi-totalité d’entre elles depuis au moins 2002, comme l’a montré Marie-Pierre Chauzat – toujours pour l’Afssa.

Or, jusqu’à là, comme l’industrie phytopharmaceutique ne cesse de le claironner, l’insecticide, pris seul, n’est pas considéré comme mortel à faibles doses. Pas plus que la Nosema d’ailleurs – Marc-Edouard Colin, de Supagro (Montpellier) a déjà montré en 2006 que Nosema était présent dans des ruches qui fonctionnaient tout à fait normalement. En revanche, la combinaison des deux constitue une bombe à retardement.

Les chercheurs ont découvert que l’association de ces deux facteurs entamait l’immunité de la colonie : le duo altère la production de glucose d’oxydase, une enzyme favorisant la production d’antiseptiques dans la nourriture des larves et dans le miel. À long terme, la cohésion du groupe est menacée, les jeunes générations sont affectées, et la sensibilité de la ruche aux autres parasites et aux maladies est aggravée.

Ces résultats confirment ceux de Jeffery Pettis, du Laboratoire des abeilles du Ministère de l’agriculture américain (Beltsville, Maryland), et de Dennis Van Engelsdorp, de l’Université de Pennsylvanie.

Au Canada, Joe Cummins, Professeur émérite de l’Université de Western Ontario, se dit heureux de cette découverte : « L’étude de l’Inra donne des preuves claires pour réclamer l’interdiction totale des néonicotinoïdes, cette famille d’insecticides à laquelle appartient le Gaucho ».

L’Imidaclopride est interdit en France sur le maïs et le tournesol, mais autorisé sur les vergers, les betteraves et les pommes de terre – autant de cultures qui ne peuvent pas se passer des abeilles pour féconder leurs fleurs et produire leurs fruits.

POUR ALLER PLUS LOIN :

  1. L’étude de l’Inra d’Avignon, publiée en mars 2010 dans la revue Environmental Microbiology : « Interactions between Nosema microspores and a neonicotinoid weaken honeybees (Apis mellifera) ».
  2. L’enquête de l’Afssa sur les ruchers français : « Enquête prospective multifactorielle : influence des agents microbiens et parasitaires, et des résidus de pesticides sur le devenir de colonies d’abeilles domestiques en conditions naturelles ».
  3. Les travaux de Joe cummins pour le Ministère de l’agriculture américain : « Neonicotinoid insecticides used both in sprays and seed dressing may be responsible for the collapse of honeybee colonies ».